Bouches-du-Rhône : un climat d’incertitude qui pénalise l’activité économique

Publié le 28 août 2013 à  10h41 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  16h13

Les résultats des entreprises ont été contrastés au 2e trimestre 2013 dans un « contexte mitigé » marqué par l’attentisme de la demande et un manque de visibilité pour les prochains mois. A noter cependant au rayon des satisfactions le bon démarrage de la saison touristique, notamment à Marseille qui tire profit de son titre de Capitale européenne de la Culture et de l’ouverture du Mucem.

Dans un trimestre marqué par l'ouverture du Mucem, Marseille a sur le plan touristique tiré profit de son titre de Capitale européenne de la Culture. (Photo Philippe MAILLÉ)
Dans un trimestre marqué par l’ouverture du Mucem, Marseille a sur le plan touristique tiré profit de son titre de Capitale européenne de la Culture. (Photo Philippe MAILLÉ)

Après une activité économique en sommeil début 2013, les entreprises du département des Bouches-du-Rhône ont affiché des résultats contrastés au 2e trimestre : c’est ce qui ressort du Baromètre 13, « la conjoncture vue par les entrepreneurs ». « Une partie de l’activité économique demeure toujours impactée par l’attentisme de la demande, le manque de visibilité et les difficultés croissantes de trésorerie. Parallèlement, certains secteurs semblent légèrement mieux orientés sur ce trimestre », observent conjointement Emmanuel Barthélémy, vice-président de l’Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône (UPE 13) en charge de l’Economie, Eric Ammar, vice-président de la CCI Marseille-Provence (CCIMP), et Eric Rebour, membre élu de la CCI du Pays d’Arles.
Au rayon des satisfactions figure le bon démarrage de la saison touristique. Après un mois d’avril plutôt difficile sur l’ensemble du département (taux d’occupation des hôtels de 56%, -3 points comparé à 2012), mai a connu une forte hausse de la fréquentation (67%, +4 points). Les professionnels se montrent ainsi satisfaits du début de saison, particulièrement à Marseille. Au cours d’un trimestre marqué par l’ouverture du Mucem, la cité phocéenne a profité de son titre de Capitale européenne de la Culture avec un taux d’occupation des hôtels de 66% en avril (+2 points par rapport à 2012) et de 73% en mai (+4 points), avec « une hausse record » du RevPAR, le revenu par chambre disponible (Sources : Bouches-du-Rhône Tourisme, Insee, DGCIS…). Le mois de juin et la première quinzaine de juillet ont aussi été très satisfaisants, surtout pour les hôtels du Vieux Port. Seule ombre au tableau, « l’effet MP 2013 semble s’atténuer hors du centre-ville et en périphérie de Marseille », avec par exemple un taux d’occupation hôtelière de 72,2% en mai à Aix-en-Provence, soit une hausse limitée à 1,3 point par rapport à 2012.
A court terme, les professionnels restent confiants (clientèle de loisirs, last minute…), hormis pour le mois d’août qui s’annonçait difficile pour les hôtels marseillais, avec « une programmation de MP 2013 moindre » et « des infrastructures balnéaires insuffisamment développées ». A noter que la clientèle française reste la première des Bouches-du-Rhône (80% des séjours), mais la clientèle étrangère progresse, que ce soit les Européens, les Américains ou les Asiatiques.

L’activité Congrès boostée par MP 2013, les croisières au top

L’activité Congrès est également dopée par l’année Capitale : grâce à la communication autour de MP 2013, et aux investissements réalisés au Palais du Pharo et au Parc Chanot, les réservations pour des événements (salons principalement) pour 2014 et 2015 ont augmenté, à fin juin 2013, de +30% par rapport à la même période de l’année 2012. Ainsi 2014 devrait être une année satisfaisante pour la Safim, gestionnaire du Palais des Congrès et des Expositions de Marseille, qui aura également en 2013 rattrapé son retard en termes de chiffres d’affaires.
L’activité est également bien orientée au niveau du transport maritime de passagers où, avec 698 000 passagers, le port de Marseille affiche une hausse de 7,5% sur le trimestre (49 000 passagers additionnels). Un résultat que la place portuaire doit au dynamisme du secteur de la croisière (390 000 croisiéristes, +27%), avec une progression de 16% du nombre de passagers en tête de ligne. Malgré l’absence du Costa Serena (en raison du vent) et du Grand Holiday (pour cause de conflit social), 198 escales ont été assurées entre avril et juin.
Le trafic des lignes régulières poursuit en revanche son recul (-5,8%) du fait d’un nombre de passagers moindre, principalement sur l’international (-22% sur l’Algérie, -25% sur la Tunisie). Après un début d’année mitigé, le trafic maritime entre le continent et la Corse affiche une hausse de 1%.
En cumul à fin juin, le trafic passagers est ainsi en hausse de 12% (964 200 passagers) grâce à l’activité croisière (+38% en cumul, soit 135 200 croisiéristes de plus qu’en 2012) qui dépasse désormais en volume celle des lignes régulières, avec une tendance à la désaisonnalisation au fil des années. L’objectif des 1,5 million de croisiéristes est conservé en 2015-2016 notamment grâce à l’élargissement de la passe nord.
L’économie départementale peut aussi se prévaloir d’une croissance du trafic ferroviaire de passagers (+2% avec 5,7 millions de voyageurs comptabilisés sur le trimestre et 11 millions en cumulé à fin juin), et d’une activité industrielle qui reste sur une « orientation correcte », notamment pour les activités agroalimentaire, électronique, microélectronique et sidérurgique, alors que les technologies de l’information et de la communication enregistrent des résultats stables. Autres indicateurs encourageants : le taux de défaillances d’entreprises est en recul de 7% dans les Bouches-du-Rhône (au 1er trimestre 2013 par rapport au 1er trimestre 2012) et le flux de dossiers en médiation est en recul.

L’activité au ralenti dans le BTP et l’immobilier

Mais dans le même temps certains secteurs sont restés sous tension au cours de ce 2e trimestre 2013. C’est particulièrement vrai pour le BTP et l’immobilier qui souffrent d’une atonie de la demande, des tensions sur les trésoreries et les marges, et d’une concurrence vive. La dégradation du contexte économique et le manque de dynamisme de la demande privée et publique affectent l’activité, tandis que les professionnels sont inquiets pour les prochains mois, notamment pour l’emploi.
Au niveau national, la morosité est toujours de mise puisque les professionnels du BTP enregistrent depuis le début du mois de l’année un repli de 4,5% de l’activité et de 3,5% de l’emploi. Dans les Bouches-du-Rhône, l’activité semble stoppée. La décélération d’activité observée a en effet été brutale par rapport à la France. Et si le département bénéficiait jusqu’alors de grands projets qui portaient l’activité (MP 2013, Stade Vélodrome, Euroméditerranée…), peu de nouveaux projets sont mis en œuvre à l’heure actuelle.
Les entreprises sont en outre confrontées à des difficultés croissantes avec une concurrence toujours plus vive sur le marché. Le recours à une main d’œuvre étrangère préoccupe les chefs d’entreprise car le phénomène « peut créer des distorsions de concurrence » et « a pour effet de tirer les prix vers le bas (jusqu’à -30%) ». L’érosion des trésoreries et des marges des entreprises, l’allongement des délais de paiement ou encore les demandes de moratoire aux administrations fiscales et sociales fragilisent aussi de plus en plus les entreprises locales, de toutes tailles.
La commande publique est également en repli, entre -10 et -20% pour 2014. Alors que peu d’investissements sont prévus dans la construction, les collectivités locales misent sur la rénovation énergétique, ce qui va affecter positivement une partie des entreprises. Mais malgré les annonces faites et le plan initié par le gouvernement en direction du secteur, les professionnels restent très prudents pour les prochains mois.
Sur le marché de l’immobilier, l’activité reste atone. Dans l’ancien, les professionnels notent une timide progression du nombre de transactions de biens, mais avec une baisse en valeur avec un prix qui dégringole de 20 à 30%. Si la demande des primo-accédants est réelle, les difficultés à trouver du financement, les craintes sur le pouvoir d’achat ou la fin de certains dispositifs incitatifs freinent la concrétisation des transactions. Quant aux investisseurs sur le marché du haut de gamme, ils sont frileux. Seuls les secondo-accédants sont présents sur le marché en raison de leur capacité à financer un projet. Ils profitent également du contexte de baisse des taux et des prix.
L’immobilier ancien reste ainsi un marché d’acquéreurs qui fixent les prix du marché. Les professionnels de l’immobilier rencontrent ainsi des difficultés à faire concorder offre et demande de biens immobiliers.

Une recrudescence du chômage qui frappe en premier lieu les seniors

Le marché locatif continue pour sa part de fonctionner au ralenti. Malgré une rénovation du parc immobilier, les professionnels constatent un tassement du flux des dossiers. Les craintes sur l’emploi, le pouvoir d’achat ou l’avenir n’encouragent pas la mobilité résidentielle. Et les demandes de congés sont souvent motivées par une volonté de recherche d’économie : logement plus petit, colocation. Enfin, comme au trimestre dernier, les problèmes de solvabilité sont récurrents.
Les raffineries enregistrent pour leur part un nouveau recul de leurs marges : elles ont baissé de 60% à 21€ par tonne alors qu’elles se situaient à 36€ par tonne au 2e trimestre 2012. Un phénomène qui semble lié à l’atonie de l’économie européenne, à une moindre consommation du parc de véhicules automobiles et à la persistance de surcapacités de raffinage en Europe. L’industrie chimique stagne quant à elle ce trimestre, tandis que la chimie organique (pétrochimie et chlorochimie) est toujours sous tension. Le commerce de gros connaît également un ralentissement d’activité. Le commerce est pour sa part toujours impacté par la baisse du pouvoir d’achat qui conduit à des arbitrages de consommation. La météo défavorable a aussi impacté l’activité.
En dehors du maritime, les principaux frets ont été en repli au 2e trimestre : -5,7% pour l’aérien, -15,5% pour la fluvial et dégradation de l’activité pour le routier. On observe également à un essoufflement de l’activité des services marchands, une atonie de la demande de crédit des entreprises et un recours à l’intérim en chute tant au niveau national que local.
Dans ce « contexte mitigé », certains indicateurs demeurent inquiétants. A commencer par le nombre de demandeurs d’emploi qui a progressé de 7,3% sur les douze derniers mois à fin juin 2013. Les seniors restent le public le plus touché sur la période (+13,7%) alors que la progression qui a atteint un pic en avril semble se stabiliser en mai et juin. Le taux de chômage a ainsi augmenté pour le 2e trimestre consécutif dans les Bouches-du-Rhône pour s’établir à 12,7% au premier trimestre 2013 (+0,5 point par rapport au 1er trimestre 2012) contre 11,9% en région PACA (+0,7 point) et 10,4% en France (+0,8 point).
La création d’entreprises marque également le pas dans le département. Entre avril et juin, elle a reculé de 7,9% par rapport au 2e trimestre 2012. La consommation est elle aussi en léger repli sur le premier semestre 2013 (-0,2% par rapport à la même période de l’année précédente). « Dans ce climat d’incertitude et de manque de visibilité, les prévisions des prochains mois sont particulièrement difficiles à établir. Les entrepreneurs continuent à faire face, à s’adapter pour maintenir leur activité, l’emploi et restaurer leur compétitivité. Il est plus que jamais essentiel que le gouvernement les accompagne et favorise leur développement », estiment de concert Emmanuel Barthélémy, Eric Ammar et Eric Rebour.
Serge PAYRAU

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