Festival d’Aix-en-Provence: Hip, hip, hip Nucci !

Publié le 18 juillet 2021 à  11h34 - DerniÚre mise à  jour le 31 octobre 2022 à  19h20

La prestation du baryton basse italien Leo Nucci Ă©tait trĂšs attendue vendredi soir au Grand ThĂ©Ăątre de Provence dans l’opĂ©ra de Verdi « I due Foscari ». S’il a l’ñge du rĂŽle du vieux Doge de Venise, en a-t-il encore la voix ? Force et de constater que oui. Triomphe et ovation debout pour lui et une Ă©clatante distribution.

Marina Rebeka, Leo Nucci et Daniel Rustioni (Photo Vincent Beaume)
Marina Rebeka, Leo Nucci et Daniel Rustioni (Photo Vincent Beaume)

Leo Nucci est un sacrĂ© bonhomme. A 79 ans, il n’hĂ©site pas Ă  venir affronter une salle festivaliĂšre devant un orchestre imposant et aux cĂŽtĂ©s de voix bien plus jeunes que lui. DĂ©fi relevĂ© et mĂȘme si l’opĂ©ra de Verdi « I due Foscari » a Ă©tĂ© donnĂ© en version de concert, force est de constater que cet artiste est dĂ©finitivement Ă  classer au rang des stars. AdulĂ© Ă  l’OpĂ©ra de Marseille, ovationnĂ© ces derniĂšres annĂ©es au pied du mur d’Orange, c’est avec une Ɠuvre peu donnĂ©e qu’il a sĂ©duit les festivaliers aixois. Dans ce rĂŽle de Doge ĂągĂ© qui est tiraillĂ© entre sa fonction et sa famille (il ne lui reste qu’un fils qu’il condamne pour une meurtre qu’il n’a pas commis) Nucci excelle arrivant sur scĂšne avec un visage hantĂ© par la douleur et le questionnement.

Les premiĂšres notes lĂąchĂ©es donnent le ton : ce sera grand, trĂšs grand ! Et mĂȘme si la projection est un peu moins puissante qu’il y a quelques annĂ©es, ce qui est somme toute logique, elle est compensĂ©e par des graves affirmĂ©s, une prĂ©cision de tous les instants et une diction remarquable. Puis il y a son jeu d’acteur (mĂȘme en version de concert) qui transparaĂźt dans chacun de ses dĂ©placements, dans chacune de ses postures. Son «Rendez moi mon fils» du dernier acte, sur les sons lugubres des cloches de Saint-Marc est d’un potentiel Ă©motionnel extrĂȘme. Du trĂšs grand art lyrique.

Distribution de premier plan

Pour l’accompagner dans son triomphe, Pierre Audi, le directeur du Festival d’Aix-en-Provence, avait conviĂ© une distribution remarquable au premier rang de laquelle il convient de placer Marina Rebeka. AprĂšs quelques notes pour placer sa voix, la soprano lettone a laissĂ© s’exprimer sa puissance et sa prĂ©cision se montrant d’une redoutable efficacitĂ© dans les aigus. C’est Francesco Meli qui prĂȘtait sa voix Ă  son Ă©poux Jacopo, le fils du Doge. TĂ©nor puissant et prĂ©cis, il a fait valoir sa belle ligne de chant, colorĂ©e et Ă©mouvante. Basse puissante et profonde, Jean Teitgen a apportĂ© au personnage de Loredano son cĂŽtĂ© cynique. Valentin Thill (Barbarigo) et AdĂšle Charvet (Pisana) ont parfaitement complĂ©tĂ© cette distribution, apportant leur fraĂźcheur, mais aussi leur maĂźtrise, Ă  leurs rĂŽles.

Daniele Rustioni idéal maestro

A la direction du chƓur, puissant et trĂšs bien prĂ©parĂ©, et d’un excellent orchestre de l’OpĂ©ra de Lyon, Daniele Rustioni a proposĂ© une lecture lumineuse de la partition, portant une attention particuliĂšre Ă  ses solistes, et notamment Ă  Leo Nucci. OpĂ©ra composĂ© par un Verdi trentenaire, «I Due Foscari» est intĂ©ressant car il synthĂ©tise ce qu’allait ĂȘtre sa production dans les annĂ©es qui suivirent. De la belle ouvrage pour Daniele Rustioni qui mĂ©ritait bien, lui aussi, une part de l’ovation debout qui ponctuait la reprĂ©sentation. Un directeur musical et un orchestre qui ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© saluĂ©s pour leur contribution Ă  «Falstaff» donnĂ© au thĂ©Ăątre de l’ArchevĂȘchĂ©. Une fois de plus Leo Nucci quittera la Provence satisfait et c’est tant mieux car il nous a donnĂ© du bonheur

Michel EGEA

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