La chronique du Festival de Pâques à Aix-en-Provence : Une très luthérienne Passion selon Saint Matthieu

Publié le 4 avril 2015 à  21h40 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h47

C’est une disposition particulière qui a été mise en place par Paul McCreesh au Grand Théâtre de Provence pour la Passion selon Saint-Matthieu (Photo Caroline Doutre)
C’est une disposition particulière qui a été mise en place par Paul McCreesh au Grand Théâtre de Provence pour la Passion selon Saint-Matthieu (Photo Caroline Doutre)

Une fois terminé le concert des jeunes musiciens, il restait aux festivaliers juste assez de temps pour descendre le long des rives du Cours Mirabeau et rejoindre le Grand Théâtre de Provence où, en cette soirée de Vendredi Saint, la spiritualité était au rendez-vous avec la très belle et très longue Passion selon Saint Matthieu de Jean-Sébastien Bach. Pour donner ce monument, Renaud Capuçon a fait appel au Gabrieli Consort and Players et à son chef et fondateur Paul McCreesh. Cet ensemble, orchestre et chœur, est réputé pour la qualité de ses interprétations et leur originalité. Pour le Festival de Pâques, la règle n’a pas connu de dérogation. Sur scène, deux chœurs de quatre voix chacun (en même temps solistes) et deux orchestres de douze musiciens et musiciennes avec, au centre, une violoniste. Soit trente-trois acteurs pour cette passion que l’on a l’habitude d’entendre donnée par des formations beaucoup plus conséquentes. On est là dans la configuration de création, hors les effectifs choraux, puisque de part et d’autre de l’église, Bach avait disposé deux chœurs et deux orchestres avec deux orgues, qui se répondaient, une partie des solistes se trouvant d’un côté et l’autre, de l’autre… Que dire de cette interprétation sinon qu’une fois passée la surprise de l’effectif, l’auditeur est plongé dans la musique de Bach dans ce qu’elle a de plus authentique. En fait, la partition est débarrassée de tout ce qui pourrait être superflu et dans ce dépouillement très luthérien, ce qui est somme toute logique, elle s’impose, lumineuse et spirituelle sous la direction sensible et fouillée de Paul McCreesh. Les instrumentistes sont remarquables avec des vents précis et colorés, les cordes superbes et expressives. Du côté des voix, la distribution est assez homogène, notre coup de cœur allant à Tim Mead, contre-ténor, puissant à la ligne de chant remarquable. Une mention, aussi, pour l’Evangéliste, le ténor Nicholas Mulroy; sollicité pendant les deux heures quarante-cinq de représentation. Quant aux chorals, on oublie très vite le «format» des chœurs, les huit voix imposant un beau volume, avec précision et cohérence. Après la Messe en Si, cette Passion selon Saint-Matthieu fut un deuxième rendez-vous spirituel de haute tenue pour ce troisième Festival de Pâques.
Michel Egea

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