Marseille. Signature d’un accord en préfecture pour mieux lutter contre l’illettrisme

Illettrisme, innumérisme, illectronisme tous ces mots barbares riment avec handicap au quotidien. En France 1 adulte sur 10 est concerné. Près de 5 millions de personnes ont des difficultés avec les compétences de base. Le partenariat signé entre le Centre régional de ressources sur l’illettrisme et l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme doit permettre de mieux cerner le phénomène en Provence.

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Le partenariat signé entre le Centre régional de ressources sur l’illettrisme et l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme doit permettre de mieux cerner le phénomène en Provence © Joël Barcy

 Tous les territoires concernés

« Notre région est pleine de disparités avec un fort nombre de quartiers de  politique de la ville où les fragilités sociales se cumulent, constate Corinne Matteaccioli, chargée de mission régionale pour l’Agence Nationale de Lutte contre l’illettrisme. Des phénomènes de reproduction de pauvreté vont engendrer des situations d’illettrisme. » Mais le phénomène ne se limite pas aux quartiers populaires, le monde rural est lui aussi touché. « L’accès aux structures culturelles de prévention est moins évident à la campagne or on sait que dès les premiers enseignements être éloigné du livre et d’environnement qui vont créer des habitudes et des réflexes est dommageable. »

Tous les publics touchés

Contrairement à certaine croyances, l’illettrisme et l’innumérisme ne touchent pas que les personnes les plus âgées. La dernière étude remonte à 2013, c’est loin, mais elle donne des enseignements et surtout elle démontre que tous les publics sont touchés avec une part importante chez les jeunes en région. « Pour les 16-35 ans, 35% étaient concernés alors qu’on était à 26% au niveau national. C’est dire la prépondérance de ce public en Provence-Alpes-Côte-D’azur. » L’accord-cadre signé entre l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme et le Centre régional de ressources sur l’illettrisme devrait permettre une plus grande visibilité et définir qui fait quoi.

L’avenir commence à 50 ans

 Aline Le Guluche témoigne, écrit. Illettrée, sa vie a été un combat au quotidien. Elle était dans le brouillard, incapable de s’exprimer. Finalement elle est retournée sur les bancs de l’école, à 50 ans. « L’illettrisme c’est bien plus qu’un complexe, c’est un handicap, un empêcheur de vivre, on ne peut pas se libérer commente-t-elle. On n’est pas autonome, on est obligés de demander aux autres et on peut se faire avoir pour signer des papiers. » Pour Aline sa vie d’illettrée a été une honte. « Ça ne devrait pas car c’est un handicap. On n’a pas tous les mêmes débuts de vie dès le primaire et on n’arrive pas toujours en sixième en sachant lire et compter. Cela été mon cas. Mais ce qui m’a surpris c’est qu’en retournant à l’école j’ai vu qu’il y avait des mômes de 20 ans. Je pensais qu’il n’y avait plus ces problèmes à notre époque eh bien non ! Grâce à la lutte contre l’illettrisme, j’ai découvert qu’il y avait encore des millions de personnes en difficultés avec les notions de base. »

Changement de vie

Aline a totalement changé de vie après 50 ans. « Quand je suis retournée à l’école, j’ai appris à lire et à écrire mais surtout j’ai repris de l’autonomie, j’ai appris à avoir confiance en moi, à revendiquer mes idées, parler à haute voix. J’ai commencé à lire et j’ai passer un CAP, j’ai pu réaliser des CV, des lettres de motivations. » Et comme elle a commencé à s’affirmer elle a intégré le syndicat de l’hôpital.  « J’aime bien m’intéresser aux choses et comme ça, j’ai pu aider les gens. » Aline a commis plusieurs ouvrages où elle relate son expérience et encourage les personnes en difficulté, avec les chiffres et les lettres, à ne pas se renfermer et à franchir le pas de l’école. Elle a une argument massue « Depuis que je suis retournée à l’école, je suis devenue une autre personne. »

Reportage Joël BARCY

 

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