Après un mois et demi de procès, le tribunal correctionnel de Marseille rendra ce lundi 7 juillet son jugement pour déterminer les responsabilités dans l’affaire des effondrements mortels de la rue d’Aubagne. Un ancien adjoint au maire est sur le banc des prévenus, aux côtés d’un expert, du syndic ou encore de copropriétaires.

L’enjeu de ce procès était de déterminer les différentes responsabilités dans ce drame qui a coûté la vie à huit personnes le 5 novembre 2018. Parmi les seize prévenus à comparaître, on comptait douze personnes physiques et quatre personnes morales (SCI, SARL). Parmi eux, Julien Ruas, l’adjoint de l’ancien maire Jean-Claude Gaudin. Il était à l’époque en charge de la police des immeubles en péril. Également sur le banc des accusés : Richard Carta, architecte-expert désigné par le tribunal administratif dans une procédure de péril grave et imminent, mais aussi Marseille Habitat, propriétaire de l’immeuble inoccupé du 63 rue d’Aubagne, et le cabinet de syndic Liautard, gestionnaire du 65. Ce procès compte 87 parties civiles dont la ville de Marseille.
Marseille effondrée: trois immeubles à terre rue d’Aubagne

C’est un drame que Marseille a vécu de 5 novembre 2018 avec l’effondrement, vers les 9 heures, de deux immeubles anciens en centre-ville situés aux numéros 63 et 65 de la rue d’Aubagne (1er) et 75 % du 3e immeuble (n°67) qui s’est ensuite écroulé pendant les opérations de sécurisation du chantier. Huit personnes ont perdu la vie.
Un réquisitoire à deux voix
Pour ce procès hors normes le ministère public a opté, fait rare, pour un réquisitoire à deux voix. Le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone s’est déplacé et a revêtu sa robe de magistrat. Une manière de montrer que « la quintessence du ministère public est de protéger les plus faibles». Pour lui : «Les effondrements ne doivent rien au hasard, à la fatalité, ou encore à la pluie ». Comme la municipalité Gaudin avait pu l’évoquer. «Ce procès n’est pas une simple affaire judiciaire, insiste-t-il, c’est une blessure dans le cœur de Marseille. La cité phocéenne possède le triste record de l’habitat indigne. 40 000 logements sont répertoriés dans le rapport Nicoll. Cette catastrophe a apporté un terrible éclairage sur l’habitat indigne. Elle a mis sur le devant de la scène ce que l’on ne voulait pas voir. Ces morts injustes ne l’ont pas été pour rien ». Le procureur de la République a aussi salué l’action des associations citoyennes qui ont servi d’aiguillon à la justice. « Souvent les magistrats sont emportés par une sorte d’impériosité or ces actions collectives sont complémentaires ». Et de conclure en indiquant que le ministère public fera « des réquisitions fermes mais sans excès et adaptées aux fautes de chacun».
« Drame de l’attentisme et de la cupidité »
Pour le vice-procureur Michel Sastre, l’effondrement de la rue d’Aubagne, « c’est le drame de l’attentisme et la priorisation d’enjeux économiques. Ils l’ont emporté sur les aléas du risque. Tous les locataires avaient peur pour leur vie, leur sécurité, leur sûreté. En outre ils ont été soumis à des conditions indignes de logement »…
Joël BARCY et Patricia CAIRE