Budget 2026. «Tout le monde » va «devoir participer à l’effort », prévient François Bayrou 

 Ce mardi 15 juillet, le Premier ministre a présenté son plan pour réaliser 40 milliards d’euros d’économies en 2026 et ramener le déficit à 4,6% du PIB. Des économies, beaucoup d’économies…

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François Bayrou © Joël Barcy

Le surendettement, une «malédiction» pour la France

«C’est une malédiction qui n’a pas d’issue.» Avant de présenter l’orientation budgétaire de son gouvernement pour 2026, François Bayrou a rappelé la situation critique des finances publiques de la France. Il a fait le parallèle avec un foyer qui s’endetterait non pas pour financer des investissements mais pour financer ses dépenses du quotidien : «Ça s’appelle le surendettement», a-t-il martelé, dénonçant une «malédiction» pour le pays. Le chef du gouvernement rappelle que la dette de la France représente aujourd’hui plus de 3 300 milliards d’euros.  Soulignant que «chaque seconde, la dette de la France augmente de 5 000 euros»

La France est le pays du monde qui dépense le plus d’argent public 

Le premier ministre affirme que la France est « devenue le pays du monde qui dépense le plus d’argent public », soit « 57 % de notre production nationale chaque année, contre 50 % seulement de recettes ». Il parle ainsi de « paradoxe français ».  « Nous sommes le pays du monde qui a les impôts et les charges sociales les plus élevées. Et si l’abondance des impôts faisait la richesse et le bien-être d’une nation, nous serions le pays le plus prospère et le plus heureux de la planète. Et pourtant notre économie souffre », assène-t-il.

Deux plans :  Un pour dire “stop à la dette”, un autre pour dire “en avant la production” 

Le premier ministre estime qu’il faut mettre en œuvre deux plans d’action « qui forment un ensemble cohérent », soit un plan pour dire « stop à la dette » et un plan pour dire « en avant la production ». « Un tel mouvement de redressement serait déjà difficile en temps ordinaire, mais les temps que nous vivons aujourd’hui à l’échelle de la planète sont menacés comme ils ne l’ont jamais été », souligne-t-il avant de rappeler les « nouvelles menaces », dont la guerre en Ukraine et le conflit du Proche-Orient  « Cela nous oblige à organiser notre propre défense pour l’avenir. Cela nous oblige à organiser et à renforcer notre autonomie stratégique », insiste-t-il

 Respecter la loi de programmation militaire 

Le chef du gouvernement dit qu’il souhaite respecter la loi de programmation militaire. «Et cela se traduira par quelque 3,5 milliards d’investissements supplémentaires en 2026 et 3 milliards de plus en 2027 ».

Près de 44 milliards d’euros d’efforts prévus

François Bayrou souhaite aller encore plus loin. « Au lieu des 40 milliards prévus, si la situation ne s’était pas aggravée en matière de Défense, nous avons décidé de porter ce chiffre à 43,8 milliards, soit près de 44 milliards », annonce-t-il. « C’est tout d’abord l’État qui va montrer l’exemple, et stabiliser ses dépenses et même réduire son train de vie. L’État se fixe comme première règle de ne pas dépenser davantage à l’euro près en 2026 qu’en 2025, à l’exception de l’augmentation de la charge de la dette et des dépenses supplémentaires pour le budget des armées. » Le Premier ministre  dit vouloir réduire de 3 000 postes le nombre d’emplois publics dès 2026.

 Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite

Il annonce une règle de non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite. Mais l’État doit aussi mieux maîtriser son patrimoine, poursuit le premier ministre. « Nous allons créer une société foncière pour réduire, gérer et rendre utile le patrimoine improductif de l’État », dévoile-t-il. Et prévoit aussi la suppression d’agences « improductives qui dispersent l’action de l’État ». « Les dépenses seront recentrées, plusieurs centaines, peut-être entre 1 000 et 1 500 emplois seront supprimés », indique le Premier ministre.

 Santé : un « effort » de 5 milliards d’euros

« La maîtrise des dépenses publiques passe aussi par celle des dépenses sociales » et indique: «Si nous ne faisons rien (…)  Cette dépense augmentera l’année prochaine de 10 milliards d’euros. Ce n’est pas soutenable. Je propose que nous fassions l’effort de limiter cette hausse de moitié », signale-t-il.  Et le Premier ministre parle d’un effort collectif  «de l’ordre de 5 milliards d’euros ».  Évoquant, entre autres, la prise en charge des affections de longue durée (ALD). Ces dernières concernent 20 % des Français, contre 5 % de la population allemande, signale le Premier ministre. « Nous allons donc engager une réforme en profondeur de prise en charge de ces affections avec, dès 2026, des mesures visant à sortir du remboursement à 100 % des médicaments qui sont sans lien avec les affections déclarées », annonce-t-il. Sans oublier de pointer la « dérive » des arrêts maladie et propose d’y mettre fin .

 Année blanche pour 2026

Afin d’économiser quelque sept milliards d’euros, le Premier ministre a annoncé une «année blanche» en 2026. «C’est une année dans laquelle on augmente plus ni les prestations, ni les barèmes (…) C’est une année où on aura exactement le même montant des retraites pour chaque pensionné que celui qu’on avait en 2025», a précisé François Bayrou. Un «effort collectif, très important et temporaire», qui «concerne toutes les catégories de Français». La règle «sera de ne pas dépenser plus en 2026 qu’en 2025. Pas moins, mais pas plus pour chacun d’entre nous». L’occasion d’indiquer qu’«il n’y aura pas de revalorisation générale ou catégorielle dans les ministères».

 Lutte contre la fraude

François Bayrou assure vouloir renforcer « la lutte contre la fraude en améliorant la détection et surtout le recouvrement de ces fraudes et des amendes. En 2023, 15 milliards d’euros de fraudes ont été détectés, mais seulement 11 milliards ont été recouvrés. En 2024, c’est presque 17 milliards de fraudes qui ont été mis en évidence, mais seulement 11 milliards qui ont été recouvrés », poursuit le chef de gouvernement. « Nous nous attaquerons à tous les types de fraude », insiste François Bayrou en détaillant : la fraude fiscale, la fraude aux aides publiques mais aussi la fraude à la dépense de santé. « Cette lutte doit s’inscrire dans la durée. Nous allons déposer un projet de loi à l’automne contre la fraude sociale et fiscale pour mieux la détecter, la sanctionner et recouvrer l’argent perdu », assure le premier ministre.

Une «contribution de solidarité» instaurée pour les plus riches

François Bayrou veut «demander un effort particulier à ceux qui ont la capacité de contribuer davantage», que ce soient les ménages les plus aisés ou les grandes entreprises. Une «contribution de solidarité», dont les contours doivent être définis avec le Parlement, sera demandée aux plus fortunés.

Il dit vouloir d’abord se concentrer sur les niches fiscales et sociales qui profitent d’abord aux ménages les plus aisés et aux grandes entreprises. Il a également estimé que « des avantages pour frais professionnels pour les retraités ne sont pas absolument justifiés ». « Mais, ajoute-t-il, il ne faut pas toucher les petites retraites et les retraites moyennes. Nous allons créer un forfait annuel, ce qui permettra d’avantager les petites retraites, de garantir un pouvoir d’achat inchangé aux retraites moyennes et de remettre dans le droit commun les retraites les plus importantes », détaille François Bayrou. Il annonce ainsi la création d’une « contribution de solidarité » pour les Français « les plus fortunés », en affirmant que « l’effort de la nation se doit d’être équitable » pour redresser les finances publiques. Cette contribution « devra faire participer à l’effort national les plus hauts revenus », a-t-il dit, en rappelant aussi sa volonté de « lutter contre l’optimisation abusive des patrimoines non productifs ».

Reconquête de la production

Le chef de gouvernement estime que la France ne produit pas assez. « Et de même que notre objectif est de réduire le déficit budgétaire à 3 % d’ici à 2029, nous devons réduire notre déficit commercial, ce qui passera par le renforcement de notre tissu productif et le soutien à nos entreprises partout en France », affirme le chef de gouvernement, qui estime que « la reconquête de la production est aussi cruciale que la lutte contre les déséquilibres budgétaires ».

8 mai, lundi de Pâques : deux jours fériés supprimés

«Pour que la situation de la France s’améliore», François Bayrou propose que deux jours fériés «soient supprimés pour tout le pays». Ces derniers ont d’ailleurs déjà été cochés sur le calendrier : le «lundi de Pâques, qui n’a aucune signification religieuse et le 8 mai, dans un mois de mai devenu un véritable gruyère», a affirmé le premier ministre.  Celui-ci souhaite ainsi que «toute la nation travaille plus pour produire et pour que l’activité du pays dans son ensemble soit plus importante dans l’année».

Assurance-chômage, droit du travail : vers de nouvelles négociations

François Bayrou va proposer aux partenaires sociaux d’ouvrir des négociations sur l’assurance chômage et sur le droit du travail afin notamment de « faciliter les recrutements » et augmenter les offres d’emploi. « Nous devons avoir comme but que le travail soit toujours un choix gagnant et qu’il n’y ait plus aucun frein au fait de travailler ou de travailler plus », estime le Premier ministre.

Les retards de paiement plus durement sanctionnés

Le gouvernement souhaite s’attaquer aux retards de paiement, pratiqués parfois sciemment pour gagner du temps, qui fragilisent les PME. «L’État est déterminé à renforcer les sanctions à l’égard des débiteurs», a assuré François Bayrou, indiquant que celles-ci pourront atteindre jusqu’à 1% du chiffre d’affaires.

Une taxe sur les petits colis

Le premier ministre estime qu’il est aussi nécessaire de changer « nos modes de consommation », en encourageant davantage les circuits courts et les commerces de proximité. « C’est pourquoi une taxe va être proposée sur les petits colis afin de protéger nos commerces et nos producteurs de la marée de concurrence déloyale qui les assaille », dit-il.

L’innovation

L’une des clés pour la relance de la production, c’est l’innovation, affirme François Bayrou : « Comme je l’ai annoncé, nous orienterons davantage les financements de France 2030 vers les secteurs prioritaires de l’intelligence artificielle et du cyber dans tous les secteurs de notre activité. » Il ajoute que d’ici 2035 l’économie française devra recruter près de 100 000 nouveaux ingénieurs et techniciens par an et souligne l’importance du plan « filles et mathématiques » visant à encourager l’orientation des jeunes femmes et des femmes vers les sciences de l’ingénieur et du numérique.

Prêt à perfectionner ce plan

« Ce plan, s’il est perfectible, nous ne demandons qu’à le perfectionner. Toutes les idées seront examinées, qu’elles proviennent des partis politiques, des groupes parlementaires, du Conseil économique, social et environnemental, des partenaires sociaux, des collectivités territoriales ou des citoyens de notre pays », assure le chef de gouvernement, qui dit que ce plan n’est qu’un « préambule ».

Conscient du «risque» de censure

Face à la menace de censure qui plane au-dessus du gouvernement Bayrou, le Premier ministre l’assure : «Il n’y a que des risques pour le gouvernement.»  « La mission des gouvernants, c’est d’identifier les risques, de les affronter en mobilisant l’énergie du pays sans crainte et sans préoccupation personnelle », poursuit le Premier ministre. Le gouvernement « sait parfaitement qu’il est à la merci des oppositions, autant qu’ici ou là des doutes de ses soutiens. On voit cela depuis des années, mais le gouvernement a le devoir de renverser les obstacles », conclut-il.

Patricia CAIRE

 

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