L’appel de Marseille et de sa communauté arménienne au cessez-le-feu immédiat dans la région du Haut-Karabagh

Publié le 1 octobre 2020 à  21h20 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  12h13

A l’appel du Conseil de coordination des organisations arméniennes de France (CCAF) Sud, quelque 1 500 personnes se sont rassemblées, ce mercredi 30 septembre, dès 18 heures devant la préfecture de Marseille, pour dénoncer l’offensive de l’Azerbaïdjan au Haut Karabagh et demander au gouvernement français de prendre une initiative urgente afin de contraindre l’Azerbaïdjan à déposer les armes.

Photos Destimed
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Ils étaient des milliers à brandir pancartes et banderoles pour dénoncer «une déclaration de guerre faite à l’Arménie» par l’Azerbaïdjan. Parmi la foule, avec toute son énergie, la jeunesse arménienne bat le pavé à l’appel du CCAF et de son président, Julien Harounian. Un appel également entendu par de nombreux élus qui étaient présents et solidaires dans les revendications : Renaud Muselier, le président de la Région Sud, Martine Vassal, la présidente du département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence, Benoît Payan, Premier adjoint à la maire de Marseille ou encore l’adjoint en charge de la sécurité, Yannick Ohanessian. «Il ne s’agit plus aujourd’hui de discuter mais d’agir auprès des élus, influenceurs, autorités compétentes, pour que cessent des combats qui ont déjà fait des nombreuses victimes : militaires mais encore civiles avec des hommes, des femmes, des enfants…», a déclaré Julien Harounian à la tribune. «Depuis le cessez-le-feu de 1994, l’Azerbaïdjan n’a cessé de violer ce dernier convenu avec l’Arménie, précisément. Jusqu’alors, il s’agissait d’escarmouches, d’actes isolés, mais cette fois-ci c’est véritablement une déclaration de guerre qui est faite à l’Arménie. Nous ne pouvons pas rester sans rien faire, et l’autorité internationale ne peut pas fermer les yeux. L’Azerbaïdjan attaque ce territoire pour récupérer cette terre du Karabagh. Il faut avoir en tête que cette attaque lancée dans le but de récupérer cette terre est aussi la volonté du dictateur Ilham Aliev (le président de l’Azerbaïdjan NDLR) d’exterminer le peuple arménien.»

«Nous avons la preuve que des djihadistes sont recrutés et payés pour aller tuer des Arméniens sur le front»

Avant que les principaux élus à la tête des collectivités locales ne soient reçus par le préfet de région à 19 heures pour évoquer la situation, le président du CCAF développait : «À la différence des années 1990, cette guerre actuelle prend une toute autre tournure. Car un nouvel acteur entre dans le jeu : le dictateur Erdogan (le président de la Turquie NDLR) qui soutient ouvertement les bombardements menés. Ankara attise la haine, met de l’huile sur le feu, et dans ce projet veut terminer vis-à-vis du peuple arménien le travail de 1915, en fournissant pour cela des hommes et des armements à l’Azerbaïdjan. Et même – nous en avons la preuve depuis les derniers jours – des djihadistes qui sont recrutés et payés pour aller tuer des Arméniens sur le front… » Il ajoutait encore : «Nous ne laisserons pas le conflit s’embraser, et ne fermerons pas les yeux face à la situation. Nous lançons tous réunis devant la préfecture avec les nombreux élus présents un appel à la paix, en disant : stop à la guerre ! Nous appelons d’ici, ensemble, le président Emmanuel Macron à agir. Nous avons entendu les dernières déclarations, mais aujourd’hui nous avons dépassé un stade. Et sommes ici pour peser sur le président de la République, sur les parlementaires, pour qu’ils demandent un arrêt total des combats. Nous sommes et devons être des ambassadeurs de cette cause.»

« L’Azerbaïdjan bombarde non seulement le Karabagh, mais aussi l’Arménie »

Pour Pascal Chamassian, qui est fortement impliqué au sein de la communauté arménienne à Marseille: « Nous assistons clairement à une déstabilisation totale de la région par la Turquie, qui manœuvre derrière cette guerre, l’Azerbaïdjan étant son peuple frère. Les deux entendent remettre en place leur vieux projet de Panturquisme, et, au milieu, il y a l’Arménie avec son peuple, qui se trouve sur cette terre, qu’ils veulent éliminer une fois de plus. Ils s’en prennent ainsi à cette province du Haut-Karabagh, peuplée par des Arméniens, qui a déclaré en 1988 son autodétermination. Depuis, il y a eu des guerres successives sur place qui ont fait des milliers de morts. Les Arméniens se sont battus pour faire valoir leurs droits. Poussé aujourd’hui par la Turquie, dans une impunité totale, l’Azerbaïdjan bombarde non seulement le Karabagh, mais aussi l’Arménie. Il faut insister sur le fait que depuis les derniers jours, l’intégrité territoriale même de l’Arménie est atteinte, avec de nombreux civils touchés, tués… » Pascal Chamassian considère : «Il faut que les différents acteurs de cette situation soient condamnés, d’une seule voix. Je cible en premier lieu le sultan Erdogan mais aussi la Russie avec Poutine dont la position manque volontairement de clarté, mais encore l’Iran qui voudrait être un médiateur pour des raisons personnelles… Pour mieux comprendre ce qui se passe, tout le monde a de bonnes raisons aujourd’hui de laisser-faire… Nous attendons beaucoup du Président Macron pour qu’il entraîne avec lui l’Europe et en prenne le leadership afin de faire revenir la paix dans cette région.»

«La France est à la manœuvre pour mobiliser nos partenaires européens»

Renaud Muselier, le président de Provence-Alpes-Côte d’Azur déclare : «Cette guerre est meurtrière et le peuple arménien du Haut-Karabakh mérite notre soutien. Pour obtenir le cessez-le-feu, il faut engager toutes nos forces dans le multilatéralisme : mardi, les quinze membres du conseil de sécurité de l’ONU ont demandé un cessez-le-feu global et l’arrêt immédiat des combats, avec reprise des négociations entre Azerbaïdjan et Haut-Karabakh. L’OSCE, a mandaté la France, les États-Unis et la Russie en tant que 3 co-présidents du groupe de Minsk – cet après-midi, au conseil de sécurité de l’ONU, les trois co-présidents du groupe vont alerter et pousser pour la fin des conflits et la reprise des négociations et, sur la scène européenne, la France est à la manœuvre pour mobiliser nos partenaires européens. Dans ce dossier, le rôle de la Turquie est évident, puisqu’elle soutient par ses déclarations la position de l’Azerbaïdjan. Après la déstabilisation de la Grèce et de l’Europe en Méditerranée cet été, la Turquie met encore en péril la stabilité et la paix dans le bassin méditerranéen et dans sa zone d’influence. Je suis en relation permanente avec le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, qui connaît parfaitement les enjeux géopolitiques de cette situation. Il est urgent de trouver une solution pour un cessez-le-feu : sur le terrain, les combats s’intensifient et mettent en danger la vie de dizaines de milliers de civils ». Benoît Payan, lance à son tour : «Marseille a toujours été aux côtés du peuple Arménien. Fidèle à notre histoire, à notre tradition et à nos valeurs, nous appelons à l’arrêt des combats et à la paix au Haut-Karabakh. La guerre que mène l’Azerbaïdjan doit cesser». Pascal Chamassian de conclure : «L’agression actuelle est complètement déséquilibrée, avec 3 millions d’Arméniens d’un côté face à 10 millions d’Azéris et 80 millions de Turques de l’autre, armés jusqu’aux dents, avec des pétrodollars… Face à eux, les Arméniens se battent avec leurs tripes pour répondre aux attaques, au prix de leur vie. Il faut que cela s’arrête et que la communauté internationale intervienne très vite.»
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