Les 1 260 salariés de Massalia, le plus gros site régional d’Orange seront en télétravail à partir d’aujourd’hui et pendant deux semaines. Dans un courrier adressé aux salariés le responsable régional justifie cette décision: « En raison des événements survenus sur la voie à proximité du campus». Corinne Simon, la préfète de police déléguée auprès du préfet de police des Bouches du Rhône, qui a visionné les images, conteste la survenue de tels événements.

Dossier bouillant

Attention, on marche sur des oeufs dans cette affaire, surtout à 4 mois des municipales. Aussi la préfecture de police s’est entourée de précautions avant de parler aux médias. La veille, le communiqué de presse de la CFDT d’orange intitulé « le narcotrafic met les salariés en état de siège», a fait l’effet d’une bombe. Plus de 1 200 salariés contraints de travailler chez eux, faute de pouvoir se rendre sur leur site en toute sécurité. Les autorités policières ont donc visionné le contenu de l’ensemble des caméras de surveillance du secteur et vérifié les appels au 17. « Depuis le début de la semaine nous n’avons eu aucun appel 17 de la société Orange, assure Corinne Simon. Nous avons eu hier l’appel d’un commerçant qui relatait qu’un client avait entendu des coups de feu. Quand la police est allée sur place elle n’a rien constaté. Nous n’avons par ailleurs trouvé aucune image prouvant qu’il y a eu des rixes aux abords du site ces derniers jours. »
« Droit dans nos bottes »
Côté syndical on a lu ou entendu les propos de Corinne Simon. La CFDT conteste sa posture. « Nous sommes droits dans nos bottes, assure Jérôme Bissey, délégué syndical CFDT Orange Grand Sud. Les fusillades, les bagarres ce ne sont pas des illusions. Nous on veut que les salariés puissent venir travailler sans craindre pour leur vie. » Les autorités tentent de minimiser en décryptant la réalité du terrain. « La rixe de mercredi n’était pas liée au narcotrafic mais à un vol de trottinette. L’auteur a été interpellé. Par aucun signalement de la part d’Orange et aucune plainte ne nous est remontée », annonce la préfète déléguée.
Hystérisation

Cette fermeture du site arrive dans un contexte particulier, celui de l’assassinat de Mehdi Kessaci, un acte peut être d’intimidation en direction de son frère, sous protection policière depuis la parution de son livre à la rentrée. Il y dénonce la violence du narcotrafic. Cet événement a eu un retentissement national. Ministres de l’Intérieur et de la justice sont venus à Marseille. Puis, la présidente de l’Assemblée et des élus nationaux se sont joints au rassemblement où plus de 6 000 personnes étaient présentes près du lieu où le jeune homme a été abattu. Tout cela a un impact sur les esprits, le ressenti. « Tout est décuplé avec ces événements à Marseille, il y a une sorte d’hystérisation », conclut Cédric Esson, le directeur interdépartemental de la police nationale.
Dédramatiser sans nier
Confrontée à une situation sensible, Corinne Simon joue sur un double tableau : dédramatiser sans nier l’insécurité dans ce secteur. « Il est encore une fois important de prendre au sérieux et je ne minimise absolument pas la position des salariés et la crainte qu’ils peuvent avoir. Il est important de les écouter mais mon rôle c’est aussi de rassurer, de ramener de la sérénité, partout l’État sera présent autour de la cité Félix Pyat avec des patrouilles. »
Contact avec Orange
Visiblement dans cette affaire Orange et police se sont ignorées. A la stupéfaction de la fermeture temporaire du site devrait succéder un dialogue. « On va prendre contact avec l’entreprise pour travailler un peu mieux en collaboration, pour ne plus subir les faits et être en amont des problématiques pour être le plus performants possible. Il faut qu’à chaque fois qu’il a un incident sur ce secteur-là on puisse être avisés » analyse Cédric Esson. Cela évitera peut-être de renvoyer pendant deux semaines 1 260 salariés chez eux pour télétravailler.
Reportage Joël BARCY



