Marseille. « Un bal masqué » réussi pour boucler la saison de l’Opéra

C’est avec l’ouvrage de Verdi « Un ballo in maschera » que l’opéra de Marseille ferme cette saison en attendant celle du centenaire de sa renaissance. Une production des plus intéressantes signée Wout Koeken et dirigée par le maestro tant aimé ici, Paolo Arrivabeni.

Destimed Operacopie
Le bal masqué débute… Dernier tableau de l’opéra de Verdi mis en scène par le belge Wout Koeken © Christian Dresse

Du théâtre dans le théâtre. Pour mettre en scène la version originelle de l’œuvre de Verdi qui relate l’assassinat du roi de Suède Gustave III au cours d’un bal masqué donné à l’Opéra de Stockholm, le metteur en scène belge Wouit Koeken a pris le parti de la mise en abyme. Choix judicieux surtout lorsqu’on sait la passion du monarque, despote éclairé, pour l’art dramatique qu’il pratiquait lui-même. Ainsi la mascarade et le drame vont trouver leur place dans les coulisses et devant l’envers du décor d’un théâtre. Un travail aboutit avec plus que la complicité du décorateur et créateur des costumes Luis F. Carvalho qui ne manque pas de talent.

Le pitch est simple: des conspirateurs veulent la peau du roi. Son ami le comte Anckarström le sait et ne cesse de l’exhorter à mettre fin à la conspiration. Mais Gustave est insouciant et, de plus, amoureux d’Amelia, la femme de son ami qui en pince aussi pour lui. Un amour platonique qui sera mis à jour et qui poussera le comte à trucider son altesse après avoir rejoint les conspirateurs.

Il n’en fallait pas plus à Verdi pour composer l’un des chefs-d’œuvre les plus aboutis de sa production, délaissant le bel canto pour livrer une partition toute de puissance et d’émotion, accompagnant parfaitement l’action et, c’est le principal, des solistes lyriques confrontés à des airs somptueux. Une musique magnifiée par la direction du maestro Arrivabeni qui n’ignore plus rien des charmes de la musique de Verdi et qui profite d’être à la direction de l’orchestre de l’Opéra qu’il affectionne particulièrement, les instrumentistes le lui rendant bien, pour visiblement prendre du plaisir et nous en procurer encore plus.

Sur scène, une fois de plus, réunie par le directeur de l’Opéra Maurice Xiberras, c’est une distribution idéale qui est au chant. A commencer par l’Amelia de Chiara Isotton qui s’affirme en soprano verdienne, toute de puissance et de sensibilité avec un projection idéale, un ligne de chant précise et une sensibilité de tous les instants. Ses aigus sont limpides et livrés avec aisance. A ses côtés, Enea Scala est un Gustave idéal. Le ténor trouve ici un terrain d’expression qui lui permet de mettre en avant un charme évident de comédien et ses qualités de ténor accompli. Un chant tendu et affûté, une maîtrise de la tessiture et une facilité évidente: il est the right man at the right place.

Du côté féminin, la devineresse de Enkelejda Shkoza nous a séduit. Un beau mezzo mature et au vibrato qui donne au personnage toute sa dimension. Puis il y a l’Oscar de Sheva Tehoval, mi page-mi bouffon mais tellement séduisant(e) dans un rôle ou sa voix juvénile fait merveille, tout comme son charme espiègle.
Le baryton albanais Gezim Myshketa incarne un comte Anckarström physiquement et vocalement impressionnant et les conspirateurs qui ont les traits de Maurel Endong (comte Ribbing) et Thomas Dear (comte Horn) sont à l’unisson de la qualité de l’ensemble tout comme Gilen Goicoechea idéal Christiano qui lui était au bon endroit au bon moment pour prendre du grade et de l’or.

Puis il y a le chœur de l’Opéra, tout en maîtrise et en couleurs vocales, excellant dans ces moments qu’affectionnait de composer Verdi, des moment chargés de sens que la phalange vocale marseillaise donne avec précision idéalement préparée par son chef de chœur Florent Mayet qui n’aura pas mis longtemps pour prendre la mesure de ses qualités.

Avec ce bal masqué, le rideau tombe sur une riche saison à l’Opéra et l’on a hâte d’être rendus à la prochaine qui, rappelons-le, sera celle du 100e anniversaire de la renaissance de la salle lyrique marseillaise…

Michel EGEA

« Un ballo in maschere » de Verdi à l’Opéra de Marseille. Autres représentations les 7 et 11 juin à 20 heures, le 9 juin à 14h30. Plus d’info et réservations : opera.marseille.fr

Articles similaires

Aller au contenu principal