Opéra de Marseille – Un Barbier de Séville loin d’être rasoir pour les fêtes

Vous en voulez de la bonne humeur ? Alors rendez-vous à l’Opéra de Marseille pour les représentations du « Barbier de Séville » programmées pour les fêtes. Enfin, si vous arrivez à dégoter une place. Car jusqu’au 4 janvier la maison affiche complet ; on ne cessera de le répéter : sur les quais du Vieux-Port, le bel canto fait recette !

Destimed Barbier
Le Final de ce « Barbier de Séville avec Rosine et Almaviva qui s’élèvent dans la nacelle d’une Montgolfière sous les regards de Bartolo et don Basilion (à g.) et de Figaro (à dr.) © Christian Dresse

Elle vaut vraiment le coup cette production de l’opéra le plus connu de Rossini. Il faut dire qu’en trois heures de musique, le compositeur a truffé son « Barbier de Séville » de « tubes » dont les airs courent dans les têtes. « Figaro ci, Figaro là… », « La calomnie », entre autres, sont des pierres vocales de taille de l’ouvrage. La production programmée pour les fêtes par Maurice Xiberras, le directeur général de l’opéra marseillais, est signée du Rouennais Pïerre-Emmanuel Rousseau pour la mise en scène, les décors et les costumes. On est au XVIIIe siècle à Séville, Rosine est enfermée par son tuteur Bartolo entre les murs d’un superbe patio où se déroule l’action. Rien ne choque, tout est en adéquation avec le livret et pourtant on est bien loin de la mièvrerie et de l’espagnolade à bas coût. Au contraire, le travail proposé est d’une grande modernité et retient l’attention du début à la fin.

Eleonore Pancrazi, superbe Rosine

Dans cet environnement soigné, la comédie n’occulte pas des préoccupations actuelles moins heureuses comme les violences faites aux femmes, ici l’enfermement et les mariages forcés mais l’évocation qui en est faite l’est avec une extrême sensibilité, en pointillés bien présents. Et Rosine, loin d’être une pupille soumise, affirme sa féminité et sa liberté, n’hésitant pas à fustiger Don Basilio, le maître de musique, à coups d’éventail lorsque ce dernier tente d’approcher ses mains baladeuses. Une Rosine qui, à Marseille, a les traits d’Eleonore Pancrazi. La mezzo-soprano ajaccienne prend avec bonheur ce rôle qui lui convient à merveille, scéniquement et vocalement. La ligne de chant est précise et solide et les nuances agréables. Le sourire qui illuminait son visage aux saluts en disait long sur sa satisfaction.

Un Figaro impressionnant

Du côté des hommes, c’est le Figaro de Vito Priante qui se taille la part du lion avec une prestation magistrale en barbier bad boy, cicatrice sur le visage et couteau vite dégainé. Le jeu est virevoltant et la voix puissante, idéalement projetée, avec une aisance et une décontraction étonnantes. A ses côtés, l’Almaviva de Santiago Ballerini, s’il possède une certaine noblesse, connait un début de représentation délicat et va en s’affirmant au fil des minutes. Marc Barrard, on le sait, c’est la solidité incarnée, les deux pieds sur scène et les cordes vocales affutées. Le rôle de Bartolo, barbon déplaisant, il le connait bien et en fait son affaire sans problème. Tout comme Alessio Cacciamani campe un don Basilio impressionnant par sa taille et par sa voix de basse avec laquelle il livre idéalement son air de la calomnie. Andreea Soare (Berta), Gilen Goicoechea (Fiorello) et Norbert Dol (l’officier) complètent la distribution avec qualité vocale et perfection scénique, le chœur de l’opéra apportant sa contribution à l’ensemble avec bonheur. A la direction de l’orchestre maison, dont le son sied parfaitement à la musique de Rossini, Alessandro Cadario propose une lecture parfois un peu linéaire d’une partition qui ne demande qu’à pétiller… C’est de saison !

Michel EGEA

Prochaines représentations les 28 décembre (14h30), 31 décembre et 2 janvier (20 heures) et 4 janvier (14h30). Plus d’informations et réservations : opera-odeon.marseille.fr

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