Publié le 20 novembre 2017 à 23h22 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 17h47
Tal Coat : de la violence à l’abstraction
L’histoire de Tal Coat c’est un peu celle d’un Breton sur les pas de Cézanne. «Un Breton dans la lumière de Cézanne», écrit Bruno Ely dans le dossier de presse consacré à l’exposition qui a pourtant été baptisée « Tal Coat, la liberté farouche de peindre ». Tout simplement parce que le conservateur en chef du musée Granet n’a pas voulu se cantonner à la période aixoise du peintre (de 1940 à 1956) mais a tenu à présenter, avec Jean-Pascal Léger, co-commissaire de l’exposition, une véritable rétrospective de l’œuvre de Tal Coat. Et bien lui en as pris. Car entre les premières œuvres peintes dans les années 1920 et celles des années 1980, il y a une vie entière de périodes différentes entre réalisme et abstraction. Tal Coat, en breton, veut dire « front de bois » ; tête dure, peut-être, mais les photographies publiées dans le catalogue laissent découvrir un homme au visage doux, aux traits laissant deviner une grande sensibilité. Surnommé «le peintre des peintres»Tal Coat se liera d’amitié avec nombre de ses confrères et c’est chez André Masson, à Château Noir, qu’il vivra la majeure partie de sa villégiature en pays d’Aix. Sa sensibilité, il ne fait aucun doute qu’elle transparaît dans la série «Massacres» réalisée alors que la guerre d’Espagne liquide les civils. Des œuvres fortes, sans aucune concession, terribles regards sur une réalité insoutenable. On admirera aussi une série de portraits qui témoignent de son talent de dessinateur et une note un peu naïve avec le Paysage de Dolëan. Et petit à petit l’abstraction gagne du chemin. Elle va se montrer dès 1945 avec la série des Poissons. C’est la période aixoise et Tal Coat aime à aller taquiner les motifs cézanniens. Paysage du Tholonet, Campagne Aixoise ont un petit quelque chose qui rappelle le maître d’Aix dont une toile majeure est exposée à quelques mètres (lire plus haut). Bleu Surgi, immense huile sur toile accrochée au milieu de l’escalier qui change d’étage, marque une rupture et ouvre une partie importante consacrée au travail au couteau et à une abstraction totalement libérée mais aussi maîtrisée. Pour nous le point d’orgue, même s’il n’est pas monumental, c’est cette huile sur toile sans titre, mais mentionnée Colza, lumineuse, vibrionnante, dense et apaisante. Un exceptionnel parcours d’art et de vie d’un artiste hors normes qui prend encore plus de relief lorsque sa fille nous confiera que pendant qu’il travaillait, Tal Coat écoutait en boucle des chants grégoriens, des œuvres de Machaut ou la messe de Pérotin. Tant de spiritualité ne pouvait qu’ouvrir les chemins de la liberté et magnifier la palette qui va avec.
Michel EGEA
Pratique. Au Musée Granet Tal Coat, la liberté farouche de peindre, jusqu’au 11 mars 2018 ; Cézanne at home, jusqu’au 1er avril 2018. Du mardi au dimanche de 12h à 18 heures. Le musée sera fermé les 25 décembre et 1er janvier. Diverses animations sont prévues autour de ces expositions, se renseigner au 04 42 52 88 32.
museegranet-aixenprovence.fr