Publié le 18 février 2025 à 10h15 - Dernière mise à jour le 20 février 2025 à 10h25
Grand émoi à Copenhague : le corps de Mogens Klinge, le directeur du renseignement de la police, l’un des plus hauts du service du renseignement de la police danoise est retrouvé gisant dans le port au volant d’une Mercedes, l’arrière de son crâne défoncé par une balle. Que faisait-il d’ailleurs dans les parages, en compagnie d’une fille elle aussi mutilée ? Outre le meurtre, un sachet transparent en plastique anaérobique contenant une pochette en tissu aux fines rayures de couleurs vives enfoncée dans sa gorge attire l’attention des enquêteurs.

Démasquer le ou les coupables ne s’avèrera pas chose aisée. Chargé officiellement de l’enquête Jan Hesk se heurte à d’innombrables réticences voire obstacles de sa hiérarchie dont celles et ceux de Kim Sleizner qui, à la tête de la police criminel de Copenhague, demeure néanmoins un sale type. C’est un maître chanteur, un violeur, ayant marché sur des cadavres pour arriver au sommet sans que jamais on n’ait pu recueillir d’éléments suffisants pour le mettre sous les verrous. Dunja Hougaard, femme flic très sportive, rassemble depuis des mois avec son équipe des preuves contre ce « ripoux » meurtrier. Qui n’est autre que son ancien chef hiérarchique. On suivra en parallèle le parcours de l’inspecteur suédois Fabian Risk, ivre de douleur depuis que son fils Theodor s’est suicidé en prison dans des circonstances auxquelles Kim Sleizner n’est peut-être pas étranger.
Des portraits et des dialogues à couper le souffle
Glaçant d’effroi, offrant un épilogue totalement inattendu où l’on verra que certains hommes du pouvoir danois sont totalement impliqués, « Coup de grâce » du Suédois Stefan Ahnhem est un coup de maître fictionnel, et un coup de poing pour le lecteur. Courses contre le crime, rebondissements, fausses pistes et vrais scandales d’État, l’auteur enchaîne, fascine et inquiète. Notons que ce thriller que l’on peut lire indépendamment des autres productions de l’auteur est le nouveau tome d’une série à succès qui lui a valu une reconnaissance internationale. Saluons la maestria narrative d’un écrivain surdoué, maître du thriller qui faisant mine de nous offrir un serial-killer sur un plateau brouille peu à peu les pistes par le biais de scène hallucinantes de réalisme et des dialogues à couper le souffle.
La force du livre est de brosser aussi le portrait de personnages dit secondaires, notamment des femmes brillant par leur courage, des policiers, enquêteurs, médecins légistes et autres proches de ceux-ci. Flemming Friis, directeur de la prison d’Elseneur où s’est pendu Theodor, Fareed Cherukuri et Qiang Who, deux génies de la programmation, Trin Bladh, de l’institut médicolégal, Oscar Pedersen, le directeur de ce même institut, le procureur général Mads Jensen, Astrid Tuvesson, la supérieure de Sleizner qui avait déposé plainte contre lui, Julie Bernsorff, embauchée par Sleizner, l’avocate Jadwiga Komorovski, l’inspecteur de police Morten Heinesen, Sonja, l’épouse de Fabian Risk, le très déterminé et menaçant Henrik Hammersten, le directeur général de la police du royaume, et une énigmatique Camilla Krystchoff, (pour ne citer qu’eux), et dont certains périront de mort violente, composent l’extraordinaire kaléidoscope de « Coup de grâce » ce roman foisonnant, au souffle épique traduit du suédois par Caroline Berg.
Si on rajoute le rappel ici des cinq meurtres et deux tentatives d’homicides perpétrés autrefois par le médecin légiste Ingvar Molander, la capture de Hao Wikholm, désormais célèbre sous le nom de « L’Assassin aux dés » on verra que l’affaire des cadavres dans le port prend peut-être racine dans un passé funeste. Ajoutons enfin que Stefan Ahnhem, cet écrivain suédois surdoué sera présent en France, à Lyon, en avril 2025 lors de la 21e édition du festival « Quais du polar », et que c’est une raison supplémentaire de se plonger non pas dans les eaux tumultueuses de Copenhague mais dans son œuvre foisonnante.
Jean-Rémi BARLAND
«Coup de grâce»par Stefan Ahnhem. Traduit du suédois par Caroline Berg – Albin Michel – 539 pages – 22,90€.