La chronique cinéma de Jean-Rémi Barland. « Avignon » : un hommage en forme de romance aux acteurs et lieux du Off

Tiens voilà Arthur Fenwick. Grégory Corre, Rudy Milstein, Charlotte Matzneff, Amaury de Crayencourt, ou Romain Francisco, (pour ne citer qu’eux) autant de comédiens et comédiennes que l’on a pu croiser lors du Festival Off et Inn d’Avignon. Oh, mais c’est l’affiche de « L’impatient », le seul en scène de Marc Tourneboeuf qu’il jouera cette année encore dans la cité des Papes ! Pas de doute, nous faisons une halte rue des Teinturiers, nous passons pas mal de temps place des Corps Saints et nous sommes plus tard en face du mythique théâtre « Le chêne noir » dans lequel se dérouleront quelques-unes de scènes du film « Avignon » qui sort sur les écrans.

Destimed Baptiste Lecaplain et Elisa Erka Copyright 2024 Nolita Cinema Marine Danaux
Baptiste Lecaplain et Elisa Erka dans le film “Avignon”   © 2024 Nolita Cinema Marine Danaux

Les Festivaliers se sentent finalement comme chez eux et ce sentiment de proximité avec les lieux traversés renforce le plaisir procuré par ce long métrage signé Johann Dionnet. Une romance très éloignée d’un quelconque esprit « théâtre d’urgence » où l’on se traîne par terre, et où personne ne vomit même si le cœur y est. L’argumentaire en est assez simple : « Comédien en perte de vitesse, Stéphane (Baptiste Lecaplain) débarque avec la troupe de Serge (Lyes Salem) au Festival d’Avignon pour jouer une pièce de boulevard qu’on croirait écrite pour un début de programme sur France Télévisions. Il y recroise Fanny (Elisa Erka),  une comédienne de renom et tombe sous son charme. Profitant d’un quiproquo pour se rapprocher d’elle, car il en est fou amoureux, il s’enfonce dans un mensonge lui faisant croire qu’il joue Rodrigue dans la production du Cid au ” Chêne noir”. A force de mentir, le plus souvent en  alexandrins, Fanny est persuadée de se trouver devant un grand acteur, ardent défenseur comme elle du répertoire classique.»

Pas de volonté d’opposer ici théâtre populaire et classique

Beaucoup plus subtil qu’on pourrait le supposer, « Avignon » rend hommage aux interprètes, aux metteurs en scène, et aux structures faisant exister le Off d’Avignon. Pas de volonté, pour le réalisateur Johann Dionnet, d’opposer deux manières de penser la scène. Pas de mépris chez lui d’un théâtre voulant sans vulgarité atteindre le public au cœur. Souci de montrer combien finalement les acteurs et actrices demeurent plus solidaires qu’on ne le pense. Et puis le couple formé par un Baptiste Lecaplain magnifique de densité et Elisa Erka, divine à chaque apparition à l’écran persuade au final que comme le dirait Beaumarchais : « Si l’amour porte des ailes, n’est-ce pas pour voltiger ». Les autres partenaires de jeu sont à la hauteur. Alison Wheeler (Coralie), Lyes Salem, Rudy Milstein (Marc), Constance Carrelet… étant tous irrésistibles … La mise en scène -qui privilégie les gros plans, les silences, les non-dits- se veut autant humble qu’efficace. Généreuse aussi. Comme le point de vue de Johann Dionnet, qui en filigrane interroge le goût des uns et des autres. A voir absolument avant… le Off d’Avignon 2025 bien évidemment.

Jean-Rémi BARLAND

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