Benoît Payan, maire de Marseille et Lionel Stora, président du FSJU Marseille-Provence remettent le Prix Robert Mizrahi

Alors que la France célèbre le 80e anniversaire de sa libération du joug du régime nazi, l’antisémitisme revient en force dans le monde. C’est dans ce contexte lourd que le maire de Marseille vient de remettre le Prix Robert Mizrahi qui récompense un travail réalisé par un jeune sur «la Transmission mémorielle» à Zelda Sokolowski et le prix «coup de cœur du jury» à des lycéens de l’École de Provence. Cette récompense, initiée par le Fonds Social Juifs Unifié (FSJU) Marseille Provence , est remise depuis 2021 en partenariat avec la ville de Marseille, qui poursuit ainsi son engagement pour honorer le devoir de mémoire.

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Remise du prix Robert Mizrahi en présence de Robert Mizrahi entouré du maire de Marseille Benoît Payan et Lionel Stora , président du FSJU et des lauréats (Photo Michel Caire )

 

Robert Mizrahi est né à Marseille en 1930. Lors des Rafles des Juifs à Marseille, ses parents ont été arrêtés par la police municipale puis déportés. Profondément marqué, il consacrera une grande partie de sa vie à honorer les Justes parmi les Nations. Humaniste, militant convaincu, il sera successivement Président du FSJU et Président du Comité Français pour Yad Vashem. Il a œuvré à préserver la mémoire de la Shoah et honorer la mémoire de ceux qui, au péril de leur vie, ont aidé les Juifs persécutés. Lionel Stora, le président du FSJU déclare : « Il mérite qu’un prix porte son nom. Ainsi la mémoire continuera de se perpétuer à travers le travail des jeunes générations. Une mémoire que nous pensions pour demain, avec la disparition des témoins. Malheureusement l’actualité nous montre l’importance de cette mémoire aujourd’hui ». Le prix 2024 récompense le travail de Zelda Sokolowski sur son arrière grand-tante, Régine Szmidt. Un prix « coup de cœur du jury » revient à des lycéens de l’établissement Provence pour un travail collectif avec leur professeur de philosophie.

« L’antisémitisme n’a pas sa place dans la République »

« Ce prix a pour objet d’inciter les jeunes à devenir acteurs de la transmission de mémoire », rappelle Lionel Stora. Mission d’autant plus importante que «nous assistons à une résurgence inquiétante de l’antisémitisme ».  Parle de ces témoins de l’Histoire qui ne sont jamais «dans la violence, la rancœur, le rejet de l’autre ».  Considère que «l’antisémitisme s’exprime, alors qu’il n’a sa place ni dans les écoles, ni dans les lycées, ni dans les universités, les syndicats ou les partis politiques. L’antisémitisme n’a pas sa place dans la République ». Pour Lionel Stora: « Il importe plus que jamais d’agir comme le fait le maire de Marseille en donnant le nom de Denise Toros-Marter à une école ». Il ajoute que le prix ne cesse de se développer, qu’un travail est accompli en ce sens avec l’Éducation Nationale.

Ce devoir de mémoire Elie Wiesel, Prix Nobel de la Paix, en a dit toute l’importance : « L’oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n’est responsable de leur première mort, nous le sommes de la seconde.»

« La vigilance ne suffit plus »

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Robert Mizrahi a œuvré à préserver la mémoire de la Shoah et honorer la mémoire de ceux qui, au péril de leur vie, ont aidé les Juifs persécutés (Photo Michel Caire)

Patricia Mizrahi, prend la parole au nom de son père. Ses premiers mots sont pour Benoît Payan : « Merci d’être fidèle à l’amitié qui vous lie à mon père ». Puis sollicite les personnes présentes : «Pour prendre le relais de mon père dans ses combats contre l’antisémitisme car la vigilance ne suffit plus. Quand un étudiant est agressé, quand une vieille femme est massacrée, quand les mots perdent leur sens, ce sont les valeurs de la République qui sont mises à mal ».

Benoît Payan rappelle : « Il y a 79 ans, le 5 mai 1945, les alliés libéraient Mauthausen. Mauthausen, l’horreur des camps, la violence extrême, l’extermination, tout se sait et la mémoire s’impose. 79 ans après on doit faire face à la résurrection de l’antisémitisme que certains pensaient endormi. On entend des voix qu’on pensait éteinte. Alors il ne faut pas faiblir, il faut rester ferme, uni, dans ces moments. L’antisémitisme est un poison violent qui détruit tout sur son passage, nourrit par un silence coupable du péché électoral ».

« Il appartient aux responsables politiques de droite comme de gauche de dénoncer l’antisémitisme »

Pour  le maire de Marseille, l’antisémitisme puise ses racines dans la haine d’un peuple « qui a perpétuellement refusé l’ordre établi, qui cherche toujours à rassembler quand les dogmes cherchent à diviser ». « L’antisémitisme, poursuit-il,  se déchaîne depuis le 7 octobre et il n’en finit pas de nous surprendre tant il est vicieux, violent, tant il réussit à se répandre dans des milieux auxquels on ne s’attendait pas. Il touche les plus jeunes et fait du mal aux plus anciens ». Il considère qu’« il appartient aux responsables politiques de droite comme de gauche de dénoncer l’antisémitisme », de ramener le plus grand nombre à la raison « sachant que pour certains il n’y aura rien à faire sinon les envoyer devant la Justice pour qu’elle les condamne ».

«L’oubli est la ruse du Diable »

Benoît Payan à  Robert Mizrahi : « Il n’y a dans tes yeux que la flamme de l’amour, de la paix, de la tolérance ». Il rend hommage au travail réalisé par les collégiens et les lycéens : « Vous pouvez être fiers en accomplissant ce travail de mémoire. Vous offrez une stèle à ceux qui n’en ont pas. Et, avec le travail que vous accomplissez vous lutter contre l’oubli qui est la ruse du Diable ». Il invite les vainqueurs « à l’inauguration de l’école Denise Toros-Marter ». Annonce qu’une école Albert Cohen devrait également voir le jour, «lui le grand écrivain, l’ami de Marcel Pagnol, lui qui découvrit l’antisémitisme le jour de ses 10 ans à Marseille». Marseille, poursuit-il, « qui ne serait pas Marseille sans les Juifs et sans les autres composantes qui constituent la Ville ». Benoît Payan lance : « Certains me critiquent pour vouloir donner de tels noms à des écoles. Et alors ? Je suis tellement fier de faire cela. On doit vivre en paix et que ceux qui divisent se taisent à jamais, que les racistes, les antisémites se taisent à jamais ».

Zelda Sokolowski remercie le jury et avoue « avoir pris un grand plaisir à faire ce travail tout en mesurant combien il était important dans le contexte actuel ». Alors que ce travail porte sur son arrière grand tante elle indique : « avoir découvert des choses sur l’histoire de sa famille, sur la vie. Elle a tant souffert et pourtant elle est heureuse. Elle parle toujours de sa maman alors qu’elle l’a perdue quand elle avait 5 ans ».

Michel CAIRE

 

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